Comité de Solidarité avec les Indiens des Amériques

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DÉCLARATION DE LA RENCONTRE DU RÉSEAU EUROPÉEN ZAPATISTE, MILAN, 17 NOVEMBRE 2019

publiée le 03/12/2019 par CSIA-Nitassinan

DÉCLARATION DE LA RENCONTRE DU RÉSEAU EUROPÉEN ZAPATISTE, MILAN, 17 NOVEMBRE 2019

En ce 17 novembre 2019, fête anniversaire de la naissance de l’Armée zapatiste de libération nationale, nous sommes plusieurs collectifs provenant d’Italie, de Grèce, de l’État espagnol, de Chypre, d’Euskal Herria, de France et de Suisse, membres du réseau européen zapatiste, à nous être réunis dans le centre social « Casa Loca », à Milan, en Italie.

Trente-six ans après sa fondation, l’EZLN ne cesse pas de nous surprendre et de nous réveiller, nous montrant une fois de plus que, même si nous vivons encerclés par le capitalisme, le racisme et l’hétéropatriarcat, la construction d’autres mondes reste possible et est plus nécessaire que jamais ! Avec la fondation en août 2019 de nouveaux centres de résistance et de rébellion constitués de sept nouveaux Caracoles et de plusieurs nouveaux municipes autonomes, les zapatistes nous donnent à nouveau une grande leçon de vie et de lutte, dessinant sous nos yeux des chemins d’espoir dans un monde chaque fois plus cerné par la répression, la guerre et la destruction de la vie. Dans ce contexte, nous restons à l’écoute des appels à soutien de ce digne processus de construction de l’autonomie, et nous réitérons notre engagement et notre solidarité avec la lutte de l’EZLN.

C’est avec enthousiasme que nous participerons au « Combo pour la vie » de ce mois de décembre de résistance et de rébellion, ainsi qu’aux multiples rencontres convoquées par les compas. Les femmes du réseau tout spécialement, ont décidé de proposer une participation collective à la seconde rencontre internationale des femmes qui luttent, qui aura lieu du 26 au 29 décembre prochain. Nous remercions l’initiative et l’invitation faite par les compañeras zapatistes, vu que nous considérons ces rencontres nécessaires afin d’affronter les différentes formes de violence hétéropatriarcale qui, en Europe tout comme sous d’autres latitudes, traversent de manière transystémique les vies et les luttes des femmes et des personnes ayant une identité ou une orientation sexuelle dissidente.

Depuis l’arrivée au pouvoir au Mexique d’Andrés Manuel Lopez Obrador, pas un jour ne passe sans qu’on puisse se rendre compte de la tromperie et du mensonge de la soi-disant arrivée de la gauche au pouvoir avec son projet de « Quatrième Transformation ». Nous souhaitons tout spécialement dénoncer l’offensive en cours pour le contrôle des ressources et des territoires du Sud-est du Mexique, au travers de l’augmentation de la militarisation, de la répression et de l’achat des consciences menée par le mauvais gouvernement. Nous dénonçons le déploiement de la garde nationale sur tout le territoire mexicain, la fermeture des frontières et la répression à l’encontre des personnes migrantes.

Les accords du gouvernement mexicain avec le gouvernement de Trump sont la preuve évidente de la subordination du gouvernement mexicain actuel à la politique états-unienne d’externalisation des frontières. Cette politique, nous la connaissons bien en Europe, où l’Union européenne externalise de la même manière la répression contre les personnes migrantes vers des gouvernements corrompus comme ceux de la Turquie, la Lybie, l’Algérie, le Maroc, etc. Dans un contexte de guerre mondiale, cette politique de fermeture des frontières transforme la mer méditerranée en un cimetière.

Nous comprenons ces politiques comme étant partie prenante de la logique coloniale, qui opère sous différentes formes au sein des territoires de ce que l’on nomme le Sud et le Nord global, et qui viole constamment les corps racialisés, s’appuyant sur différents autres systèmes d’oppression. En tant que collectifs, nous dénonçons ces politiques et nous solidarisons avec toutes les luttes qui ouvrent des brèches dans ces murs de mépris, de racisme et d’exploitation capitaliste.

Durant notre rencontre, nous avons analysé également avec beaucoup de préoccupation l’avancée des méga-projets qui se manifestent à travers la spoliation, la destruction de l’environnement, la répression et la criminalisation des défenseuses et défenseurs de la terre et du territoire. Nous dénonçons avec force la responsabilité de l’Union Européenne et des transnationales d’Europe dans ce saccage criminel :

  • Le Projet Intégral Morelos se construit sur le sang de notre compañero Samir Flores, et bénéficie des investissements d’entreprises telles que Bonatti, Abengoa, Saint-Gobain et autres multinationales. Nous restons attentifs à toute initiative convoquée par les compas du Front des village en défense de la terre et de l’eau et de la communauté d’Amilcingo à ce sujet.
  • Le corridor interocéanique de l’isthme de Tehuantepec se construit avec des dizaines de parcs éoliens propriété de multinationales européennes telles qu’Iberdrola, Gamesa, Enel ou Électricité de France, tandis que l’Union Européenne soutient la création de maquiladoras dans les futures zones industrielles de l’isthme. Nous adhérons collectivement à la campagne internationale « L’isthme est à nous » en rejet de ce méga-projet.
  • Le dénommé « Train maya » cache un plan de développement touristique, urbain et industriel sauvage aux dépens des peuples mayas, propriétaires originels de ces terres. Nous nous joignons à l’opposition des compas zapatistes et du Congrès National Indigène face à ce méga-projet qui vise l’invasion et la spoliation de tout le Sud-est mexicain.

Sur les territoires européens, nous résistons dans diverses géographies contre des méga-projets mortifères et de dévastateurs pour l’environnement, et nous souhaitons tisser des ponts de solidarité et de résistance entre ces luttes et celles qui se développent au Mexique.

Nous manifestons également notre préoccupation face aux dernières dénonciations du Congrès National Indigène et de l’Armée Zapatiste de Libération Nationale au sujet de :

  • La répression à Juan C. Bonilla, dans l’État de Puebla, à l’encontre des communautés nahuas qui luttent contre l’empoisonnement de la rivière Metlanapa.
  • L’attaque de la communauté de San Lorenzo Azqueltan au Jalisco, qui a laissé trois compañeros grièvement blessés.
  • La disparition de Carmelo Marcelino Chino et Jaime Raquel Cecilio au Guerrero, et de nombreux autres compas dans cet Etat et sur tout le territoire mexicain. Nous exigeons avec force la réapparition en vie des toutes les personnes disparues !
  • Les féminicides et les différents types de violence machiste.
  • Nous nous associons également à la dénonciation de la détention du compañero Fredy Garcia, porte-parole du CODEDI dans l’Etat de Oaxaca et exigeons sa liberté, ainsi que de tous les prisonniers en lutte au Mexique et dans le monde.

Depuis l’autre Europe, nous adressons nos embrassades à tous les compas de l’EZLN, du CNI-CIG, de la Sexta et à tous les peuples en résistance du monde, en bas à gauche !

Signature : Les collectifs réunis à la Casa Loca à Milan : Asamblea de Solidaridad con Mexico - Pais Valencia (État espagnol), Asamblea libertaria autoorganizada Paliacate zapatista (Grèce), Associazione Ya Basta ! Milano (Italie), Associazione Ya Basta ! Moltitudia Roma (Italie), Associazione Ya Basta ! - Padova (Italie), CGT (Etat espagnol), Collectif de solidarité avec les peuples du Chiapas en lutte (Paris, France), Colectivo Ramona (Chypre), Comitato Chiapas "Maribel" - Bergamo (Italie), Cooperazione Rebelde Napoli (Italie), Espiral de Solidaridad Semilla de Resistencia (Grèce), La Pirata : - Collettivo Nodo Solidale (Rome, Italie et Méxique) - Collettivo Zapatista Lugano (Suisse) - Adhérents Individuels (Allemagne, Italie, France), TxiapasEKIN (Euskal Herria), Union syndicale Solidaires (France), 20EZLN (Italie)

plus d’autres collectifs du réseau européen zapatiste qui n’ont pas pu être présents :
Accion Social Sindical Internacionalista ASSI (Zaragoza, Etat Espagnol), Associació Solidaria Cafè Rebeldía-Infoespai (Catalogne), Centro de Documentación sobre Zapatismo CEDOZ (Madrid, Etat Espagnol), Collectif Chiapas Liège, Groupe CafeZ et Casa Nicaragua (Liège, Belgique), Edinburgh-Chiapas Solidarity Group (Écosse), Manchester Zapatista Collective (Royaume-uni), Mut Vitz 13 (Marseille, France) et Retiemble (Madrid, État Espagnol)

- site internet du réseau Europa zapatista

Déclaration originale en espagnol