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L’UNESCO et le “processus d’élaboration d’une politique d’engagement” avec les peuples autochtones

publiée le 26/12/2011 par CSIA-Nitassinan

Le Jeudi 10 novembre 2011, l’UNESCO annonçait à Paris, le lancement du « processus d’élaboration d’une politique d’engagement » avec les peuples autochtones.

En ayant comme cadre la 36e Conférence Générale de l’UNESCO l’événement était présidé par Gretchen Kalonji (Sous-directrice du Secteur des Sciences naturelles) et Pilar Álvarez Laso (Sous-directrice générale du Secteur des Sciences Sociales et Humaines). Participaient à cet événement, Mme Mirna Cunningham (Présidente de l’Instance Permanente des Nations unies pour les Questions Autochtones), M. James Anaya (Rapporteur spécial sur la situation de droits de l’homme et des libertés fondamentales des peuples autochtones) et M Vital Bambanze (président du Mécanisme d’Experts sur les Droits des Peuples Autochtones).

Comme Gretchen Kalonji l’a signalé, le lancement du processus d’élaboration de la politique UNESCO en direction des peuples autochtones, déjà approuvé depuis quelques mois par l’organe de gestion le plus élevé à l’UNESCO, l’organe de Programmation, de suivi et de coordination - est un événement historique. D’après elle, cette initiative s’inscrit dans la tendance récente à concevoir des politiques définissant les principes guidant le comportement des organismes internationaux envers les peuples autochtones. L’Organisation suit en cela d’autres exemples de politiques comme celles de la Banque mondiale (qui sur cette thématique, a adopté et révisé plusieurs politiques, dont la plus récente remonte à 2005), le PNUD (qui adopta la sienne en 2000), le FIDA (qui le fit en 2009) et la FAO (en 2010).

Mme Kalonji estime que l’UNESCO poursuivra deux objectifs avec cette politique. Le premier est de « positionner de manière appropriée les programmes, procédures, activités de l’organisation au regard du nouveau panorama institutionnel qui surgit depuis l’adoption de la Déclaration des Nations unies sur les Droits des Peuples Autochtones » ; le deuxième est de « conscientiser et guider le personnel de l’UNESCO et ses comités pour mettre en œuvre la Déclaration de manière effective dans tous les aspects du travail de l’UNESCO ». Il est envisagé de concevoir cette politique dans le cadre d’une consultation large, incluant les peuples autochtones et les partenaires de l’UNESCO, « dans la mesure où le budget le permettra ».

Si, l’UNESCO considère l’importance du travail avec les peuples autochtones dans son actuelle stratégie à moyen terme (2008-2013), la disposition d’un document interne qui engage toutes les activités de l’organisation donnera de plus grandes garanties quant à l’adhésion de l’UNESCO aux principes de la Déclaration de Nations Unies sur les droits des peuples autochtones. L’objectif est de parvenir à la mise en œuvre ainsi que l’instrument juridique l’envisage, pour les organes de l’ONU dans ses articles 41 et 42.

Les représentants autochtones présents ont exprimé leurs attentes par rapport à cette politique, à savoir l’institutionnalisation de la participation des peuples autochtones aux activités de l’organisation. Cela pourrait impliquer, comme Vital Bambanze l’a évoqué, la création d’un dispositif intégré par des représentants autochtones –comme c’est le cas au FIDA-.

Mme Cunningham a rappelé que plusieurs des recommandations que l’Instance permanente fait à l’UNESCO, reflètent les priorités des peuples autochtones dans les domaines de compétence de l’organisation. Elle a mentionné entre autres : les langues, la culture et la spiritualité, l’éducation autochtone, la communication interculturelle et la protection collective des savoirs autochtones, les questions relatives à la participation dans les projets entrepris par l’UNESCO, ainsi que la protection conjointe des sites appartenant à la Liste du Patrimoine de l’Humanité et aux Réserves de Biosphère -dans lesquelles se trouvent des lieux archéologiques et sacrés d’intérêt des peuples autochtones. Cette question a été, dans les dernières années, un thème constant de préoccupation pour les représentants des trois organes autochtones internationaux présents dans la salle. A ce propos, les fonctionnaires de l’UNESCO ont précisé que l’organisation « travaille à promouvoir le consentement libre, préalable et informé et la pleine et effective participation des peuples autochtones dans l’établissement et la gestion des sites du patrimoine ». A ce sujet, James Anaya dit espérer que la politique issue de ce processus soit plus qu’un dispositif pour « ne pas nuire aux peuples autochtones ». Il souhaiterait que l’UNESCO soit proactive et encourage les Etats à faire des réformes législatives en conformité avec les droits internationalement reconnus des peuples autochtones. Il s’est joint à ses collègues pour souligner l’importance que ce processus se développe dans le cadre d’une large consultation des peuples autochtones.

A la fin des présentations, le public présent –composé principalement des délégations des Etats membres de l’UNESCO, des organisations non gouvernementales et des fonctionnaires de l’institution-, a posé quelques questions sur le processus annoncé. Parmi les inquiétudes apparut la question technique de la définition de « peuples autochtones » sur laquelle se baserait cette politique ; de quelle manière cette politique pourrait contribuer à la revitalisation culturelle des peuples autochtones ainsi qu’à la protection de leurs expressions culturelles et la transmission leurs connaissances.

Les panelistes ont répondu que, à l’instar des textes juridiques relatifs aux peuples autochtones, il n’est pas question que cette politique propose une définition ponctuelle du terme « peuples autochtones ». Le personnel de l’UNESCO ajoutait que cette politique, visant à compléter le travail de l’Organisation dans le domaine des cultures autochtones, doit se comprendre dans le cadre général des instruments juridiques sur le patrimoine culturel. Quelques invités ont exprimé leurs attentes pour que cette initiative s’avère utile à la coopération entre l’UNESCO et les ONG qui travaillent avec des peuples autochtones et améliore le travail que l’agence spécialisée conduit directement avec les peuples autochtones.

L’UNESCO commence, à partir de maintenant, un large processus pour concevoir cette politique. Elle a identifié les thématiques du programme qui impliquent les peuples autochtones et les points à améliorer. Pour le reste, elle vise à impliquer tous les secteurs thématiques de l’institution, les trois instances de l’ONU consacrées aux problématiques autochtones et d’autres organisations autochtones et partenaires de l’UNESCO. Ces dernières seront associées par médias électroniques.

Article de Verónica González González - 6 décembre 2011

Sources : http://www.sogip.ehess.fr/spip.php?article352&lang=fr

Même article en version espagnole : http://www.sogip.ehess.fr/spip.php?article353&lang=es


Verónica González González est diplômée en Relations Internationales au Mexique. Elle est actuellement doctorante en Sociologie à l’Institut des Hautes Etudes de l’Amérique Latine et à l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales de Paris. Verónica González González est également membre du programme SOGIP.

SOGIP - Programme de recherche : " Echelles de gouvernance - les Nations unies, les Etats et les Peuples Autochtones ; l´autodétermination au temps de la globalisation "