Comité de Solidarité avec les Indiens des Amériques

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Une délégation du CSIA-Nitassinan / Groupe de soutien à Leonard Peltier présente à la Commémoration des trente ans des événements à Oglala (Juin 2005)

publiée le 26/06/2005 par Freepeltier

Dans les années 1970, la situation sur la réserve de Pine Ridge est intenable pour les Lakota d’Oglala. Victimes de racisme et d’actes de violence de la part des Goons, la police tribale, ils appellent à l’aide l’AIM (American Indian Movement). Les tensions entre celle-ci et le gouvernement fédéral ne cessent de croître. Le 26 juin 1975, une fusillade éclate et deux agents du FBI, Ronald Williams et Jack Coler, trouvent la mort ainsi qu’un jeune militant de l’AIM, Jo Stuntz Killsright . Robert Robideau et Dino Butler, deux membres de l’AIM accusés du double meurtre, sont acquittés. Leonard Peltier, quant à lui, jugé seul coupable en 1977, est condamné à une double peine de prison à vie. Aujourd’hui, il clame encore son innocence.

Trente ans plus tard, afin de montrer à Leonard que personne ne l’oublie malgré le temps qui passe, ses groupes de soutien à travers le monde ont décidé de marquer le coup. Le CSIA/LPSG France n’a pas manqué à l’appel et douze de ses membres ont pu se rendre sur la réserve de Pine Ridge et participer à la commémoration.

Comme chaque année depuis cinq ans, le cortège emprunte le même chemin, traversant les lieux marqués par l’histoire tragique des années de siège. Tout le monde se rassemble devant le cimetière des Little, famille traditionaliste qui a subi la répression des Goons et a été une des premières à inviter l’AIM, dont ils sont toujours restés très proches, à Oglala, en 1975. C’est dans ce cimetière que reposait le corps d’Anna Mae Aquash avant qu’on ne le transfère l’année dernière au Canada, en territoire Mic Mac, à la demande de ses filles (voir Lettre de Nitassinan n° 24). C’est aussi là qu’est enterré Jo Stuntz Killsright, qui a trouvé la mort lors de “l’Incident à Oglala”.

Des Little aux Jumping Bull

Un cercle se forme peu à peu, réunissant Lakota et supporters du monde entier, qui se recueillent pendant que la sauge circule et que les tambours résonnent. Puis tout le monde se prépare pour la marche. Les bannières de l’AIM et des groupes de soutien à Leonard Peltier sont levées, le pick-up qui accueille les tambours est prêt. Après une marche de 4 km, le cortège arrive chez les Jumping Bull, où a eu lieu la fusillade fatale aux agents du FBI. Sous un soleil de plomb, deux des avocats de Leonard prennent alors la parole. Michael Kuzma, qui a fait la longue route depuis l’État de New York, parle des procédures judiciaires destinées à obtenir la déclassification des archives du FBI concernant l’affaire. Il reste encore à étudier plusieurs dizaines de milliers de pages, dispersées dans toutes les agences du FBI à travers les États-Unis (jusqu’en Alaska où Peltier n’est jamais allé !), et dans lesquelles les avocats espèrent découvrir de nouvelles preuves de son innocence, ou des malversations du FBI.

Puis c’est au tour de Bruce Ellison, avocat de Peltier depuis trente ans, comme il a été celui de nombreux militants de l’AIM, de parler. Russel Redner, directeur du Comité de Défense de Leonard Peltier, lui tend une pipe sacrée bourrée de tabac et c’est en la tenant serrée contre lui, signe dans la culture lakota de l’importance et de la véracité de ses paroles, que Bruce Ellison s’adresse à nous.

Enfin, Russel Redner nous transmet les derniers propos de Leonard : trente ans après, il faut encore se battre pour plus de justice. Trente ans après, Leonard invite les membres de l’assemblée à se souvenir de celles et ceux qui sont morts pendant le règne de la terreur. Trente ans après, il appelle les Lakota à s’organiser, pour panser les plaies du passé, et encourage la jeune génération à continuer la lutte pour la défense des droits de leur peuple. Ce texte émouvant se termine par ces mots : « Je ne dis pas "je vous aime" facilement, mais je veux que vous sachiez que je vous aime. Mon cœur est avec vous. N’abandonnez jamais ! Vous avez mes prières, mes pensées, et ce qui me reste de vie. Je serai toujours avec vous. »

Merci !

Certes, célébrer les trente ans d’incarcération de Leonard Peltier peut être considéré, d’une certaine manière, comme un échec. Trente ans, pour un innocent, c’est trop. Beaucoup trop. Et pour de nombreux Lakota présents ce jour-là, cette commémoration est un cruel rappel des événements tragiques, du racisme et des préjugés qui persistent encore aujourd’hui. Malgré tout, la commémoration de l’"Incident à Oglala" a été, cette année encore, un succès, réunissant des personnes du monde entier qui, pour beaucoup, n’ont fait le voyage que pour participer à cet événement et montrer leur soutien au prisonnier politique, devenu le symbole de toutes les injustices faites aux peuples autochtones.

Cette commémoration n’aurait pu avoir lieu sans les contributions des différents groupes de soutien à Leonard Peltier (LPSG) et les dons de nombreuses personnes qui, comme vous, comme nous, pensent qu’il est incarcéré depuis trop longtemps pour un crime qu’il n’a pas commis.

Merci pour votre aide et n’oubliez pas, le combat continue !

Sylvain Duez-Alesandrini / Sophie Gergaud / Jean-Louis Nizon

in Lettre de Nitassinan n°30, Juillet -août - septembre 2005

- Vous pouvez retrouver des images de la commémoration 2005 dans la bande annonce du projet de documentaire autour de Leonard Peltier et des Indiens d’Amérique du Nord de Jean Louis Nizon, « Comme un guerrier » :