Comité de Solidarité avec les Indiens des Amériques

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Suite d’une longue grève de la faim

publiée le 20/08/2011 par CSIA-Nitassinan

La dernière grève de la faim, initiée le 12 juillet 2010 par trente-quatre prisonniers mapuche dans six prisons du sud du Chili, a duré près de 90 jours (cf. Lettre n° 50 p. 7). Elle s’est terminée par la signature de quelques accords établis par le gouvernement chilien et les représentants de prisonniers,modifiant deux des lois d’exception utilisées à l’encontre de militants mapuche. Non satisfaits de ces accords, quinze grévistes ont poursuivi leur action et l’ont finalement terminée sans obtenir satisfaction à leurs exigences

À la suite de ces accords, l’exécutif chilien a fait approuver des réformes à la loi n° 18.314, dite antiterroriste, édictée durant la dictature militaire. Les facultés extraordinaires octroyées par cette loi sont toujours en vigueur et la principale conséquence de son application est la suppression des garanties procédurales pour les inculpés : le secret des enquêtes porté à six mois, de longues périodes de prison préventive et l’utilisation de déclarations de témoins "sans visage" ou "masqués" ou "protégés". Sur ce dernier point, cette "particularité" de la justice chilienne n’a pas été supprimée, sinon modifiée dans son application. Par conséquent, les "fictions" judiciaires du Ministère Public restent toujours en vigueur.
Le gouvernement s’est engagé, aussi, à requalifier les délits homologués comme "délits terroristes" en délits de procédure pénale ordinaire. Ce changement n’aura cependant lieu qu’à la fin du jugement. Par conséquent, les Mapuche inculpés ont et seront toujours jugés dans le cadre de la loi d’exception "antiterroriste".
Un projet de réforme d’une deuxième loi d’exception (Justice militaire), a été envoyé au Parlement chilien, pour des modifications concernant la suppression de l’exercice des tribunaux militaires sur des personnes
civiles. Ce projet est en cours d’examen par les parlementaires.

Procès en cours

Un procès se tient depuis le 8 novembre à Cañete, petite ville située au sud du Chili, à l’encontre de dix-sept "comuneros" mapuche inculpés pour une série de supposés délits dont les accusations sont fondées sur les déclarations de 36 témoins "sans visage". Cette "particularité" des procédures de la justice chilienne est maintenant appliquée avec des modifications, mais elle permet toujours la création de montages judiciaires difficilement démontables, qui constitue l’une de principales irrégularités de ces jugements dont le cadre est défini par l’application de la loi antiterroriste.
Le déroulement de cet actuel procès permet déjà de constater l’impact négatif des réformes effectuées car, après un mois d’audience, les prisonniers politiques mapuche envisagent la possibilité de reprendre la grève de la faim afin de protester contre le non-respect des engagements pris par les autorités chiliennes.
Leur situation, après leur longue grève de la faim, demeure inchangée dans le fond. Afin d’arrêter l’exercice de toutes ces irrégularités et l’application des lois d’exception, les prisonniers ont fait la demande
d’envoi d’observateurs nationaux et internationaux, durant ce procès et ceux qui suivront, dans différentes villes du sud du Chili. C’est dans ce sens, et pour dénoncer la répression de l’État chilien et le manque
de garanties procédurales, qu’une représentante des prisonniers politiques de Concepción, Natividad Llanquileo, a fait une tournée européenne. En France, en Belgique, en Hollande, en Allemagne, en Suisse, elle a pu ainsi exprimer cet important besoin. L’intervention des observateurs constitue réellement un élément efficace de pression pour que la justice chilienne puisse accorder ses procédures aux normes internationales en la matière.
Le procès en cours à Cañete a d’autant plus d’importance que ses sentences constitueront une jurisprudence pour les quatre procès à venir. Le Collectif de Soutien au Peuple Mapuche publiera prochainement un blog d’information consacré aux rapports des observateurs internationaux présents à ces procès.

1er décembre 2010
Collectif pour les Droits de l’Homme au Chili –
Association Terre et Liberté pour Arauco

Lire la suite dans La Lettre Nitassinan n°51-52