Comité de Solidarité avec les Indiens des Amériques

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Droits des peuples autochtones et COVID-19 : Le Conseil international des traités indiens (IITC) appelle à des réponses fondées sur les droits et dénonce les violations des droits humains en cours

publiée le 22/04/2020 par CSIA-Nitassinan

POUR PUBLICATION IMMÉDIATE

15 avril 2020, Tucson, Arizona : Le Conseil international des traités indiens (IITC), une association de peuples autochtones qui compte des centaines de membres en Amérique du Nord, centrale et du Sud, dans les Caraïbes et dans les régions de l’Arctique et du Pacifique, est profondément préoccupé par la propagation du virus COVID-19 dans les territoires des peuples autochtones, par les pertes de vies humaines et les violations des droits humains qui en résultent.

Les peuples autochtones subissent des violations de leur droit inhérent à la santé depuis des siècles. L’exploitation des ressources, la destruction des systèmes alimentaires traditionnels et la contamination toxique des terres, de l’air et de l’eau des peuples autochtones provoquent des taux disproportionnés de maladies, notamment des cancers, du diabète et de l’asthme, qui compromettent les systèmes immunitaire et respiratoire à tous âges. La pauvreté, la surpopulation et le manque d’accès aux soins de santé de longue date ont encore accru les vulnérabilités. La crise actuelle de COVID-19 met en évidence ces violations permanentes des droits humains. Les taux de mortalité les plus élevés concernent les aînés autochtones, détenteurs de la sagesse, de la langue et du savoir de leurs nations.

Aux États-Unis, la nation Diné (Navajo) a été particulièrement touchée, se classant au troisième rang derrière les États du New Jersey et de New York en nombre de cas par habitant au moment de la publication du présent communiqué. Chile Yazzie, président de la section Shiprock de la nation Navajo, aide à coordonner les efforts de secours communautaires. Il a souligné que "nous [les Diné] avons un système immunitaire affaibli à cause de nos problèmes cardiaques et respiratoires, qui sont dus en grande partie au fait que nous avons inhalé toute notre vie de l’air pollué par le carbone provenant de centrales électriques et que nous vivons au milieu de mines d’uranium abandonnées et d’énormes mines de charbon. Nous vivons dans une zone nationale de sacrifice énergétique et, en raison de nos logements surpeuplés, nous sommes plus susceptibles d’attraper le virus".

Les Kuna du Panama ont également constaté des impacts croissants ainsi que des conditions qui ont rendu leur nation autochtone souveraine vulnérable. Le 13 avril, Manigueuigdinapi "Mani" Stanley Icaza, conseiller du mouvement de jeunesse Kuna, a signalé à IITC que "nos 50 communautés autonomes Kuna sont en quarantaine au Panama. Il y a 20 cas de COVID-19 à Kuna Yala et beaucoup d’autres cas parmi les Kuna vivant en ville. Plusieurs jeunes Kunas sont décédés dans la ville de Panama. Notre sage et chef Iguayokiler Ferrer est à l’hôpital de Panama City dans une unité de soins intensifs. La situation est très complexe du au fait qu’il n’y ait pas d’hôpitaux, de centres de santé adéquats, de médecins, ou de fournitures sur notre territoire".

IITC est scandalisé par le fait que la pandémie de COVID-19 ait été utilisée par certains gouvernements et entreprises fédéraux et provinciaux pour réduire les garanties environnementales et accélérer des projets de développement auxquels les peuples autochtones s’opposent depuis longtemps. Au Canada, le 1er avril 2020, le gouvernement provincial de l’Alberta a engagé plus d’un milliard de dollars canadiens pour la construction de l’oléoduc Keystone XL, destiné à acheminer le pétrole des sables bitumineux de l’Alberta jusqu’au cœur des États-Unis, s’engageant ainsi à commencer immédiatement la construction malgré la pandémie. Cet oléoduc transnational est fortement contesté par les peuples autochtones tout le long de son parcours, car il constitue une violation de leurs droits culturels, environnementaux et des traités. En mars, l’État du Dakota du Sud, le long du tracé proposé de Keystone XL, a adopté des lois "anti-manifestation" élargissant la définition des "infrastructures essentielles" pour y inclure les équipements pétroliers, gaziers et utilitaires, et déclarant "l’interruption ou la détérioration substantielle" de ces équipements comme un crime.

IITC a également reçu des rapports indiquant que les attaques contre les défenseurs des droits humains autochtones se multiplient, y compris au Brésil, où la déforestation se poursuit sans relâche alors que l’attention du monde entier est focalisée sur la pandémie.
Aujourd’hui plus que jamais, les droits des peuples autochtones doivent être respectés dans tous les efforts déployés pour faire face à cette crise. Cela inclut nos droits à la santé environnementale et communautaire, le consentement préalable, libre et éclairé, et le droit de participer à la prise de décision concernant la planification, l’élaboration et la mise en œuvre de programmes visant à protéger nos peuples et à mettre en place des solutions durables, résistantes et justes après le passage du COVID. Pour notre survie collective, IITC appelle la famille humaine et les gouvernements du monde à respecter les droits et les connaissances des peuples autochtones en ce moment critique. IITC continuera à s’opposer à toutes les tentatives des gouvernements et des entreprises d’utiliser cette crise pour accroître l’extraction des ressources, la destruction des sites sacrés et la contamination des terres, de l’air et des eaux qui compromettront davantage le droit à la santé des peuples autochtones.

Pour faire avancer la discussion, IITC organisera une série hebdomadaire de webinaires sur la pandémie de COVID-19 et les droits des peuples autochtones, à partir du vendredi 24 avril. Les prochains webinaires porteront sur la souveraineté alimentaire, l’environnement et la santé. Les prochains webinaires porteront sur la souveraineté alimentaire, la santé et la justice environnementale, les liens entre le COVID-19 et la crise climatique, les conséquences de la pandémie sur les femmes et les enfants autochtones. Plus d’informations sur ces webinaires seront publiées sur le site web d’IITC à l’adresse www.iitc.org. IITC publie également des informations reçues des peuples autochtones et des organes des Nations unies sur les conséquences de la pandémie de COVID-19.

Pour plus d’informations, contactez Andrea Carmen, directeur exécutif d’IITC, à l’adresse andrea@treatycouncil.org.

IITC
100 E. Ajo Way Tucson, AZ 85713
Phone : (520) 833-9797
Fax : (520) 833-9799
info@treatycouncil.org
www.iitc.org

Le chef spirituel kuna Iguayokiler Ferrer a été hospitalisé à cause du COVID-19 à Panama City, Panama. Photo par Mani Stanley.

Les volontaires de l’équipe de secours Navajo-Hopi COVID du Nouveau-Mexique ramassent des vivres le 10 avril 2020 à Gallup, Nouveau-Mexique, pour les distribuer aux personnes âgées et aux familles vulnérables. Photo par Janene Yazzie.

Traduction : Aurélie Journée-Duez (CSIA-Nitassinan)